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Coronaires

Publié le 13 nov 2007Lecture 4 min

Le pronostic de l'infarctus du myocarde a-t-il changé ?

P.-G. STEG, hôpital Bichat, Paris

Les 20 dernières années ont vu une véritable révolution dans le traitement de l’infarctus du myocarde (IDM) au stade aigu, ainsi que dans la prévention secondaire chez les coronariens. L’impact des avancées thérapeutiques sur le pronostic de l’ensemble des IDM reste néanmoins incertain. Et si, à l’évidence, la fréquence des troubles du rythme ventriculaire graves a considérablement diminué – ainsi qu’en témoigne la rareté des fibrillations ventriculaires compliquant l’infarctus aigu « contemporain » – l’évolution réelle de la mortalité et de la morbidité reste mal connue.

Les chiffres, souvent flatteurs de mortalité très basse et rapportés dans certains essais cliniques randomisés ou certains registres de pratique, correspondent à l’évidence à des populations très sélectionnées et non représentatives de la pratique clinique quotidienne. Il existe finalement assez peu de sources d’information fiables concernant l’évolution du pronostic de la population globale des patients atteints d’infarctus aigu.   On observe une diminution de la mortalité Les données les plus solides disponibles à ce jour sont néanmoins très encourageantes. Les registres épidémiologiques fondés sur la population, comme le registre néerlandais des IDM, montrent une réduction régulière et substantielle de la mortalité de l’IDM au stade aigu, schématiquement divisée par deux en vingt ans. Les registres hospitaliers, plus critiquables car ne recrutant que des patients ayant atteint l’hôpital vivants (et donc par définition ayant survécu à la phase aiguë préhospitalière, où la mortalité est élevée), montrent également une baisse régulière de la mortalité. Par exemple, le registre international GRACE (Global Registry of Acute Coronary Events), qui recrute depuis 8 ans dans une centaine d’hôpitaux de 14 pays, les patients hospitalisés pour suspicion de syndrome coronaire aigu, a montré une réduction de moitié de la mortalité hospitalière et des complications aiguës, notamment la survenue d’une insuffisance cardiaque aiguë pendant l’hospitalisation (figure 1). Ces données sont solides car provenant du même groupe d’investigateurs dans les mêmes hôpitaux. Ce qui est particulièrement intéressant c’est la possibilité de les relier à des modifications de prise en charge (figure 2). Ainsi, on observe des modifications importantes de l’utilisation des techniques de reperfusion, avec une réduction de la fréquence de l’utilisation de la thrombolyse intraveineuse, et une augmentation parallèle de l’utilisation de l’angioplastie primaire. On aurait pu espérer que cela se traduirait par une diminution de la proportion de patients non reperfusés mais, malheureusement, ce n’est pas le cas. Figure 1. Évolution de 2000 à 2005 du pronostic hospitalier et du pronostic dans les 6 mois suivant la sortie de l’hôpital pour les patients du registre GRACE hospitalisés pour IDM avec sus-décalage du segment ST ou bloc de branche gauche complet. Figure 2. Évolution au cours du temps des traitements de prise en charge de l’IDM aigu au sein des hôpitaux du registre GRACE. On note que la diminution du recours à la thrombolyse et l’augmentation de l’utilisation de l’angioplastie primaire n’ont pas eu d’impact notable sur la proportion de patients ne reçevant aucun traitement de reperfusion. Les registres en France Cette baisse de mortalité de l’IDM aigu est-elle observée en France ? La confrontation des résultats des trois registres nationaux consécutifs USIK, USIC 2000 et FAST-MI le suggère fortement. En effet, ces trois registres, colligés à 5 ans d’intervalle, montrent une baisse sensible de la mortalité hospitalière de l’infarctus, qui, de façon très intéressante, concerne tous les sous-groupes de traitement, y compris les patients qui n’ont pas reçu de traitement de reperfusion (figure 3), suggérant aussi que l’amélioration du pronostic provient d’autres causes que la seule amélioration des techniques de reperfusion au stade aigu. Figure 3. 3e certitude : les AVK sont efficaces pour prévenir le risque d’AVC dans la fibrillation auriculaire (réduction des AVC de 68 % et de la mortalité de 33 %). Il reste deux chantiers essentiels Si les cardiologues ont ainsi « gagné la bataille » de l’IDM aigu, peut-on dire que tout est résolu ? Malheureusement non, car les mêmes sources pointent la persistance de deux problèmes graves.   La mortalité préhospitalière de l’infarctus n’a pas baissé en vingt ans Cette situation contraste tragiquement avec l’amélioration réelle et ressentie par les cardiologues hospitaliers. Il reste beaucoup à faire pour faire reculer la mort subite extra-hospitalière et cela passe par des mesures plus lourdes et plus complexes que l’implémentation universelle de l’angioplastie en urgence. Il faut éduquer l’ensemble de la population à la chaîne des secours, mettre en place des défibrillateurs automatiques et semi-automatiques, et poursuivre la recherche sur la mort subite et sa prévention. Il y a là un grand chantier pour les 20 ans à venir.   Le pronostic secondaire reste grave Si la mortalité hospitalière a diminué, le pronostic secondaire a été nettement moins modifié. Les résultats du registre GRACE sur le suivi à 6 mois des patients hospitalisés pour IDM aigu, montrent que la mortalité dans les 6 mois qui suivent la sortie de l’hôpital n’a pas été véritablement modifiée dans les 8 dernières années (figure 1), malgré les progrès de la prévention secondaire. Ces données sont concordantes avec les observations du registre international REACH (Research on Endothelin Antagonists in Chronic Heart failure), qui montre, chez des patients coronariens stables ambulatoires, la persistance d’une morbi-mortalité élevée, malgré la disponibilité et l’utilisation des traitements modernes de prévention secondaire.   En pratique   Cardiologues (et urgentistes) ont gagné une bataille, celle du traitement de reperfusion au stade aigu de l’IDM, et cela a entraîné une réduction substantielle de la mortalité hospitalière. Il reste deux chantiers essentiels : la réduction de la mort subite extra-hospitalière et l’amélioration du pronostic à long terme de l’IDM aigu.

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