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Cardiologie interventionnelle

Publié le 02 oct 2007Lecture 7 min

Les sténoses du tronc commun en 2007 : une indication d'angioplastie ?

M.-C. MORICE, pour l’équipe de L’ICPS ; Institut Jacques Cartier, Massy

Les lésions du tronc commun sont des lésions rares (observées dans 5 à 7 % des coronarographies réalisées), mais reconnues pour avoir le plus mauvais pronostic parmi les lésions coronaires en l’absence de traitement de revascularisation. La mortalité peut atteindre jusqu’à 50 % dans les 3 ans. Si le pontage reste le traitement de référence, l’angioplastie avec stenting se pose aujourd’hui comme une alternative raisonnable.

Plusieurs études ont montré que la chirurgie de pontage améliore de façon très significative le pronostic des patients porteurs de ce type de lésion, elle est devenue et reste le traitement de référence. Quelques petites séries d’angioplastie du tronc commun, en particulier celle de Hartzler(1) au temps de l’angioplastie au ballonnet, ont été réalisées. Leurs résultats se sont révélés très décevants avec un nombre non négligeable de morts subites dans le suivi précoce, ce qui a conduit à un abandon de la technique.   Des stents nus… L’avènement des stents, qui ont rendu indiscutablement plus sûre l’angioplastie coronaire (figure 1), a donné lieu à plusieurs publications concernant les lésions du tronc commun non protégé. Initialement, le stenting de ces lésions était proposé aux patients qui avaient une contre-indication chirurgicale formelle du fait de leur âge ou de l’existence de comorbidités. Devant les bons résultats obtenus, certains auteurs ont élargi cette stratégie à d’autres patients sans contre-indication chirurgicale. On peut faire référence à P. Barragan et M. Silvestri(2) dans les registres initiaux, ainsi qu’à T. Lefèvre(3), S.J. Park(4) et A. Colombo(5). Figure 1. Tronc commun : localisation de la sténose (étude pilote française TAXUS). Une des particularités des lésions du tronc commun traitées par angioplastie est que si les lésions ostiales et de la partie moyenne du tronc sont techniquement relativement faciles à traiter, ce ne sont malheureusement pas les plus fréquentes. En effet, dans 75 à 80 % des cas, la lésion atteint le tronc commun distal et consiste donc en une lésion de bifurcation avec les difficultés inhérentes au traitement des bifurcations au moyen des stents qui sont des tubes. Différentes techniques ont été proposées, le T stenting provisionnel de la circonflexe étant la technique la plus répandue. Toutes les techniques de bifurcation (kissing stent, crush technique, V stenting, etc.) ont été appliquées également au tronc commun. Dans l’ensemble, les résultats de la phase hospitalière étaient bons avec une mortalité basse, très inférieure à 3 % chez les malades qui ne présentaient pas de contre-indications chirurgicales. En revanche, le taux de récidive avec les stents nus était assez élevé, ce qui a certainement limité la diffusion de cette approche.   … aux stents actifs L’arrivée des stents actifs au sirolimus et au paclitaxel a donné un nouvel élan au stenting des troncs communs non protégés, puisque bien entendu, ils donnent la possibilité de diminuer de façon très importante le risque de récidive. Cependant, aucune étude randomisée n’a été publiée à ce jour, et le stenting des troncs communs non protégés chez un patient qui n’a pas de contre-indications chirurgicales est fortement déconseillé dans les recommandations des sociétés savantes européennes et américaines. Les équipes citées plus haut ainsi que l’équipe de Rotterdam(6) et plusieurs centres en France ont pratiqué et pratiquent encore des angioplasties du tronc commun avec des résultats intéressants, sous couvert d’études contrôlées avec suivi clinique. Le registre français de patients traités avec des stents Taxus® en est une illustration(7). Ce registre a été conduit de mai 2003 à juin 2005 dans 4 centres de cardiologie interventionnelle à haut volume (Institut hospitalier Jacques Cartier, Massy ; Clinique Saint-Augustin, Bordeaux ; Polyclinique du Parc Rambaud, Aix-en-Provence ; Hôpital privé Claude Galien, Quincy) et comporte 291 patients.   L’expérience française des stents Taxus®   Clinique Le recul de 2 ans dont nous disposons nous permet d’en tirer quelques enseignements : - la population avait près de 69 ans en moyenne et 29 % des patients étaient diabétiques, ce qui témoigne de la sévérité de l’atteinte coronaire chez ces patients ; - 19 % avaient un syndrome métabolique ; - 76 % de ces patients étaient des hommes ; - la localisation de la lésion était à 16 % sur le tronc ostial, la partie moyenne était concernée dans 6 % des cas, et le tronc distal dans 78 % ; - 31 % des patients présentaient des lésions tritronculaires ; - l’Euroscore était de 4,8 % avec une mortalité préhospitalière prévue par cet Euroscore à 6,4 ± 10,5 % en cas de chirurgie programmée ; - 75 % de ces patients ont été également traités sur un autre vaisseau avec une longueur totale de stent de 53 ± 23 mm.   Technique La technique retenue a été le stenting du tronc commun vers l’IVA avec stenting provisionnel de la circonflexe. Deux stents ont été utilisés chez 43 % des patients avec kissing final systématique (c’est-à-dire gonflement simultané de deux ballons dans les branches de division du tronc commun) (figures 2 et 3). Figure 2. Exemple d’angioplastie du tronc commun. Figure 3. Exemple d’angioplastie du tronc commun. Résultats Les résultats hospitaliers de la phase aiguë ont mis en évidence une mortalité de 0,7 % (2 cas), 3 % d’infarctus non Q (9 cas), aucun cas d’infarctus Q, une chirurgie en urgence (0,3 %), soit un total d’événements cumulés de 3,8 %. Le suivi moyen à 24 ± 2 mois, qui concerne 278 pa-tients (95,5 %), montre une mortalité de 9,1 % (5 % d’origine cardiaque et 4,1 % d’origine non cardiaque), un taux cumulé d’infarctus non Q de 4,1 % et d’accidents vasculaires cérébraux de 0,4 %. Une nouvelle revascularisation a été nécessaire chez 10,2 % des patients, par voie percutanée le plus souvent (7,7 %) et chirurgicale (2,5 %). Le taux de thrombose de stent, si l’on se réfère aux nouvelles définitions ARC qui cumulent les thromboses de stent documentées, possibles et probables, était de 2,5 % (7 cas : 1 documentée, 1 probable et 5 possibles). Dans cette série, les prédicteurs de mortalité sont, pour certains, cliniques : l’âge, l’Euroscore, les patients insuffisants rénaux et surtout les patients en dialyse ou diabétiques. D’autres prédicteurs sont procéduraux ou anatomiques : la forme de la bifurcation (T) et la présence d’un stent dans la circonflexe sont des prédicteurs de mortalité. Ces résultats, comparables à d’autres séries publiées, sont très encourageants. On peut citer également l’autre étude multicentrique FRIEND* mise en place par la SFC par l’intermédiaire du GACI qui utilise le même stent actif Taxus®, et qui a été conduit dans 13 centres incluant des troncs communs non protégés de décembre 2005 à juillet 2006. Les mêmes techniques de stenting ont été utilisées. La population constituée de 154 patients, était peu différente de celle décrite dans l’autre registre, avec un Euroscore de 4,1 %. Les résultats du premier mois ont montré un taux de complications cumulées de 3,9 %, une mortalité de 1,9 % et un taux d’infarctus de 2,1 %, et 0,6 % de chirurgie. Le suivi à plus long terme est en cours.   En attendant les résultats de SYNTAX… Sur la base des résultats du registre TAXUS (Paclitaxel-Eluting Coronary Stent Study IV) et d’autres études (8-10) une vaste étude randomisée mondiale, nommée SYNTAX (SYNergy between TAXus stent and CABG), incluant des patients tritronculaires et 710 patients porteurs de lésions du tronc commun, a été mise en place, dont le recrutement vient de s’achever. Les patients étaient soit traités par les stents Taxus® soit par la chirurgie. Seules cette étude et trois autres essais randomisés qui sont en cours permettront de dire si l’angioplastie avec stent Taxus® peut être proposée comme alternative à la chirurgie chez les patients porteurs de lésions du tronc commun ou, plutôt, quel type ou sous-groupe de patients est éventuellement accessible à cette technique moins invasive. En attendant les résultats de ces études (ESC 2008), il convient de rester prudent et de ne pas recommander la diffusion de ces indications qui ne sont pas fondées sur les preuves. D’autres considérations doivent être prises en compte : Les craintes actuelles de thrombose tardive par défaut d’endothélisation des stents actifs de première génération peuvent certes mettre un frein à ces indications où la thrombose de stent est bien entendu dramatique du fait de la localisation. A contrario, comme il s’agit d’un vaisseau de gros calibre, si le stent est bien déployé, le risque de thrombose est très faible. Néanmoins, toute la recherche conduite actuellement pour mettre au point des stents actifs avec un risque de thrombose diminué, sera suivie avec un intérêt tout particulier pour le traitement des troncs communs. Le plus souvent, les lésions siègent au niveau de la bifurcation et clairement le dessin tubulaire des stents actuels n’est pas adapté à ce type de lésions. Beaucoup de stents dédiés sont actuellement évalués et seront particulièrement intéressants dans ce type de lésion. Enfin, et ce n’est pas la moindre des considérations, l’angioplastie du tronc commun n’est pas, contrairement à ce que l’on peut penser, une angioplastie simple à réaliser. Toute faute technique peut avoir des conséquences dramatiques pour le patient. Les techniques de formation sur simulateur qui se développent actuellement seront certainement d’une grande utilité avant la diffusion de la méthode, encore une fois si les études randomisées démontrent qu’on peut substituer l’angioplastie à la chirurgie dans ce type de lésion. * Étude multicentrique française évaluant l’angioplastie avec stent coronaire actif Taxus® au niveau du tronc commun coronaire gauche non protégé associé ou non à d’autres lésions coronaires.

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