Jean-Louis SCHLIENGER, Strasbourg
Pour résoudre ce dilemme, un groupe britannique a réalisé une métaanalyse à partir de 19 essais randomisés sélectionnés à partir du corpus d’études de la Blood Pressure Lowering Treatment Trialists’ Collaboration. La relation entre la réduction de la PA et le risque de développer un DT2 en fonction des classes d’antihypertenseurs a été explorée chez 145 939 sujets (dont 39,4 % de femmes) avec un suivi médian de 4 à 5 ans. Chaque diminution de 5 mmHg de la PA systolique était associée à une diminution du risque de DT2 de 11 % [RR = 0,89 (IC95% 0,84-0,95)] (figure). Comme attendu, le risque de développer un DT2 était plus faible sous inhibiteurs du SRAA (RR = 0,84) et plus élevé sous β-bloqueurs (RR = 1,48) ou diurétiques thiazidiques (RR = 1,20) alors que l’effet des inhibiteurs calciques s’est avéré neutre. Cette étude a été complétée par une randomisation mendélienne (données de la UK BioBank) se fondant sur des variants des gènes impliqués dans la régulation de la pression artérielle en intervenant sur la voie du SRAA qui a montré qu’une PA basse était associée à un risque réduit de diabète. En revanche, le risque de DT2 était accru lorsque les variants de la voie β-adrénergique étaient diminués alors que les effets des variants des inhibiteurs des canaux calciques étaient neutres et ceux du cotransporteur sodium-chlorure (thiazide) non concluants. La concordance de ces approches différentes renforce les résultats de la métaanalyse et permet de conclure à un probable lien de causalité entre la diminution de la PA et la diminution de l’incidence du DT2.
Cette analyse de grande envergure portant sur les données individuelles des participants à plusieurs essais cliniques randomisés apporte la preuve d’un effet préventif, certes modeste, de la diminution de la pression artérielle sur le risque de DT2. Elle a également montré que par rapport au placebo, les inhibiteurs du SRAA réduisent le risque et les β-bloqueurs et les diurétiques thiazidiques l’augmentent. Adossée à une analyse complémentaire indépendante utilisant des données génétiques, cette étude a le mérite de clarifier les résultats souvent contradictoires des nombreuses études observationnelles antérieures quant à l’existence d’une association entre l’HTA et le risque de développer un DT2. En plus de démontrer que la diminution de la PA sur le risque de DT2 est causale, ces résultats fournissent des indications quant au choix des médications antihypertensives en soulignant l’intérêt particulier des IEC et des anti-SRAA chez les sujets hypertendus ayant un profil à risque de DT2 (antécédents, surpoids ou obésité, syndrome métabolique).
Figure. Courbe de Kaplan-Meyer de la probabilité de sujets hypertendus de développer un DT2 sous traitement anti-hypertenseur (courbe bleue) par rapport aux sujets non traités (courbe rouge).
Publié par Diabétologie Pratique